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  • Estimation spéculative sur la population des personnes handicapées en Haïti

    Photo: Le Secrétaire d'État Gérald Oriol Jr et le Représentant de l’Unicef Edouard Beigbeder

    « S’il faut agir pour permettre aux personnes handicapées de prendre leur place dans la vie sociale, il nous faut des données quantitatives et qualitatives sur cette population », a fait observer, le mardi 18 juin, le secrétaire d’État à l’Intégration des personnes handicapées, Gérald Oriol, à l’occasion de la présentation du rapport mondial de l’Unicef sur la situation des enfants handicapés en 2013.

    Dans le dossier presse remis aux journalistes ainsi qu’aux représentants d’institutions au centre Zanmi Beni de Santo dans la commune de Croix-des-Bouquets, un livre, « Politique nationale du handicap», sous titré « Les grandes orientations », paru en septembre 2009, attire l’attention. Ce livre du ministère des Affaires sociales et du Travail et de la secrétairerie d’État à l’Intégration des personnes handicapées présente un tableau de répartition de la population handicapée en Haïti et  mentionne leur type de déficience : déficients moteurs 200 000 (25%) ; déficients visuels : 72 000 (9%) ; déficients auditifs : 72 000 (9%) ; personnes en difficulté d’apprentissage : 344 000 (43%) ; cas de lèpres non soignés : 8 000 (1%) ; cas d’épilepsie non soignés : 48 000 (6%) ; personnes avec des comportements étranges : 48 000 (6%) ; déficients multiples : 8 000 (1%). Cette source de Handicap international et RANIPH citée dans un document publié en 2009  révèle que 800 000 personnes sont handicapées en Haïti. Enorme!

    Il n’y a jamais eu d’enquête

    Quel est l’état de la situation du handicap en Haïti? 800 000 personnes handicapées !!? D’où ces chiffres ont-ils été tirés ? Un passage du chapitre politique nationale d’intégration des personnes handicapées, dans la section D titrée « État de la situation du handicap en Haïti » -, se veut prudent.

    « Cette question n’a pas de réponse immédiate. Pour tout élément de réponse, il est urgent d’envisager un recensement sérieux suivi d’enquêtes devant tenir compte des spécificités locales et des disparités régionales», signale le document.

    Effectivement, il faudrait mener des enquêtes sérieuses pour estimer cette population à besoins spéciaux. Et ce sont ces chiffres datant de plus de  20 ans qui ont été remis à des journalistes.  D’après ces calculs, à l’époque, 10% de la population totale d’Haïti était handicapée. Après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, quels sont les chiffres affichés aujourd’hui au tableau?

    Une source proche de l’Institut haïtien de statistique et d’informatique (IHSI), voulant garder l’anonymat, révèle qu’il n’y a jamais eu d’enquête.

    Des chiffres pas fiables

    Si nous voulons réellement contribuer à donner de la visibilité aux handicapés, les chiffres doivent sortir de ces vastes opérations d’enquête sur le terrain. Ces données, aux mains des décideurs, des acteurs locaux et internationaux, peuvent servir efficacement à l’élaboration des politiques de mise à disposition de services en faveur des personnes handicapées.

    Notons que les chiffres, lorsqu’ils ne sont pas fiables, ont une incidence sur le rapport de l’Unicef.  À propos des chiffres sur la situation des enfants dans le monde en 2013 que l’on peut retrouver sur Internet, on y lit : « D’après une estimation fréquemment utilisée, environ  93 millions d’enfants – ou 1 enfant âgé de 14 ans ou moins  sur 20 – vivent avec un type de handicap modéré ou grave. Ces estimations mondiales sont essentiellement spéculatives. Elles sont anciennes (celle citée ci-dessus date de 2004) et sont le résultat de données à la qualité très variable et aux méthodes incohérentes pour être fiables. Afin de fournir un contexte et d’illustrer les questions traitées, ce rapport présente les conclusions d’enquêtes nationales et d’études indépendantes. Il est toutefois recommandé de les interpréter avec prudence et de ne pas les comparer. »

    Reportage vidéo: Emission « Sakapfèt pou Moun Andikape yo », # 30

    Source: Le Nouvelliste